Le 05
mars de cette année, la vidéo Kony 2012 a été postée
sur Youtube, qui avait pour but de mettre en lumière les atrocités commises par
le criminel de guerre ougandais Joseph Kony et le trainer en justice. En moins
d’une semaine elle a fait le tour du monde (plus de 60 millions de vues) et a
généré un incroyable battage médiatique, principalement sur Twitter. A ce propos, un article de France 24
dit : « Il aura fallu attendre ce jeudi 8 mars, et le mot-clé
#journéedelafemme, pour que l’Ougandais Joseph Kony ne soit plus le sujet le
plus discuté sur Twitter. À la surprise de nombreux internautes, le criminel de
guerre trustait depuis lundi la première place des conversations les plus
populaires sur le site de micro-blogging ». La vidéo a suscité un tel intérêt qu’une fois
de plus la nécessité pour les africains d’avoir les TIC et plus
particulièrement Internet m’est apparue, avec cette fois une acuité sans
précédent.
Au 31
décembre 2011, 13,5% des africains utilisaient Internet et représentaient 6,2%
de la population mondiale active sur le réseau international. Quant aux
camerounais, sur près de vingt millions d’habitants ils n’étaient même pas un
million à avoir accès au net (783,956 pour être plus précis). Seulement 4% des camerounais utilisent
Internet ! Sans compter que parmi eux, très peu y ont régulièrement accès
(que ce soit à la maison, une clé Internet mobile, au lieu de service, ou avec
un smartphone) ou que la connexion au Cameroun est instable. Le taux de
pénétration d’Internet est extrêmement faible, surtout pour un pays qui doit se
développer. Car Internet offre les
solutions qui nous permettront de nous construire.
Prenons
l’exemple de l’emploi. Selon un article
de l’Effort Camerounais paru en avril 2011, 13% des jeunes camerounais à l’époque étaient au chômage. A Douala, ce taux s’élevait à 22% tandis qu’à Yaoundé,
30% de jeunes étaient au chômage. Zacharie Pérévet, Ministre de l’Emploi et de
la Formation Professionnelle, déclare que « Le chômage des jeunes touche
davantage les chômeurs de première insertion qui représentent 55% des chômeurs, quand on sait que les jeunes de 15 à 34 ans représentent le tiers de la
population totale et 60% de la population potentiellement active [les
chômeurs]». Dans un pays comme le nôtre Internet serait pour les jeunes le
moyen le plus efficace et le plus dynamique de trouver des offres d’emploi qui
leur conviennent. Il y a beaucoup de sites camerounais qui présentent des
offres d’emploi : Njorku, unikportail, cameroun.paleba, mboapages,
camdevemploi, etc. Mais combien de jeunes savent où chercher ?
Lorsque
je dis souvent à mes amis qu’on pourrait
offrir aux camerounais de grandes opportunités ils me répondent :
« tu rêves mon gars » ! Oui, je rêve. Je rêve d’un Cameroun dont
Internet n’aurait plus de secret pour le camerounais moyen. D’un Cameroun dans
lequel consulter Internet serait une pratique courante et apporterait une
valeur ajoutée aux activités des camerounais. Les écoles camerounaises posteraient
les vidéos de leurs cours dans Youtube
Education de sorte que les élèves puissent étudier sans problème et que les
parents sachent où en sont leurs enfants, afin de mieux les aider à réviser. Un
Cameroun dans lequel les enseignants donneraient cours via Skype, ou alors les
élèves feraient leurs sessions d’études en groupe via Skype. Un Cameroun dans
lequel on ferait usage des TIC pour enseigner, écrire des livres éducatifs un
peu comme le Textbook for
Ipad. Les Chromebook
aussi sont un excellent exemple de la révolution qu’entrainerait la technologie
dans un système
éducatif. Il a été testé dans des établissements scolaires aux Etats-Unis (à
Prinneville,
Oregon et à Los Angeles ).
Le Chromebook a même été adapté aux étudiants
aveugles. Un professeur affirme qu’aucune raison ne justifie le fait que
les élèves utilisent les mêmes outils d’apprentissage qu’en 1950, car cela
revient à les préparer à vivre dans une période qui est déjà révolue. La
technologie peut révolutionner et apporter une valeur ajoutée au système
éducatif camerounais. Leslie Tita et
Horace Fonkwe, fondateurs de la plate forme camerounaise Pulse l’ont bien compris. Pulse a été créé afin
de permettre aux étudiants, professeurs et administrateurs de communiquer de
manière plus efficiente. Son but est de résoudre le problème de canaux de
communication dans les universités, notamment les tableaux d’affichage, les
annonces et le bouche à oreille, qui ne sont pas très efficaces. Les annonces
(changement des horaires de cours, etc.), les devoirs à rendre, les plannings et résultats
d’examens et autres peuvent ainsi être postée sur Pulse et ce via un téléphone
mobile.
Les camerounais pourraient démarrer
leurs affaires et fonctionner avec l’aide d’Internet. Les Fondateurs du
magazine Inspire Afrika vivent aux
quatre coins de la planète et parviennent pourtant à publier leurs magazines.
Je vois croître le nombre de camerounais ayant des blogs qui leurs servent à
véhiculer leurs idées et opinions, leurs valeurs. Ils exprimeraient leurs voix
et raconteraient leur quotidien, les difficultés qu’ils rencontrent à l’instar
du printemps arabe (chaque jour, des photos et vidéos des événements étaient
postées par les jeunes, qui informaient sur leurs situations ponctuelles). Des
pages ou des groupes Facebook pour chaque ville, village, quartier, commune seraient
créés, dans lesquels nos compatriotes feraient état des situations auxquelles
ils doivent faire face et de leurs besoins (les problèmes de circulation,
l’insécurité, l’insalubrité, la recherche de l’emploi et/ou de logement, les coupures de courants et d'eau, etc.)
mais aussi exprimeraient ce qui fait la fierté de leurs lieux de résidence, les
passions qui les animent (le football, les petits bars et « beignetariats »,
le « soya man », nos mamans qui vendent le maïs grillé, nos jolies
sœurs « callboxeuses », le coiffeur du quartier, les boites de nuits, toutes ces petites
choses qui donnent de la couleur à nos quartiers et à nos villes). Je vois les
camerounais devenir acteurs de l’information, les partager avec leurs frères au
Cameroun ou à l’étranger, discuter et commenter l’actualité (les commentaires
sous les vidéos de Youtube, les tweets en live lorsqu’un événement est en cours
ou un dans le genre de Djoss.tv et tout ce qu’on peut faire sur Facebook &
Twitter). Le Gouvernement initierait ces pages afin de savoir précisément
comment répondre aux problèmes des camerounais. Les associations au Cameroun
utiliseraient Internet pour défendre leurs causes sociales et remporteraient
autant de succès au Cameroun (et pourquoi pas à l’étranger) que Kony 2012 a
attiré d’attention dans le monde, comme le font It Gets Better Project
(un projet qui a pour but de redonner
espoir aux homosexuels etc.) ou The Jubilee Project (une ONG qui fait des films
pour des bonnes causes).
A leur instar, nos ONG pourraient s’organiser autour du Web 2.0 pour lever des
fonds, recruter des volontaires, etc. Nos entreprises allieraient les
technologies à la gestion pour créer des styles de gestion inconnus des
Directeurs actuels (recruter, etc. via Internet, le web marketing, le community
management et bien d’autres choses). Les camerounais de divers horizons (politiciens,
financiers, journalistes, ingénieurs, médecins, activistes, avocats,
transitaires, hommes d’affaires, maçons, coiffeurs, informaticiens,
logisticiens policiers, acteurs, réalisateurs, artistes, agriculteurs,
styliste, enseignants, pompiers, etc.) partageraient leurs idées sur l’avenir
du Cameroun en général et de leurs métiers respectifs (9 ideas conférence est une très bonne
initiative). Mais avant tout, Le taux de pénétration d’Internet au Cameroun
passerait de 4% à 40% et continuerait à croître !
Certains ont compris que la
technologie nous permettra de résoudre nos problèmes peu à peu. Je fais ici
référence à Arthur Zang et à Churchill Mambe Nanje entre autres. D’autres non.
Certains me demandent souvent à quoi ça servirait aux camerounais d’apprendre
l’informatique, puisqu'en général dans les entreprises, on ne les utilise pas
autant. Les étudiants se disent qu’ils peuvent faire rédiger leurs rapports de
stage ou leurs mémoires par des « professionnels » de la bureautique.
Ils ont raison de poser la question. A quoi servirait-il à une civilisation
d’apprendre à lire les panneaux de signalisation si à chaque coin de rue il y a
un homme pour crier « stop », « interdiction de garer »,
« feu rouge, feu vert, feu orange », etc. ? A ceux-là je réponds
que le jeune camerounais ne devrait pas se préparer pour le Cameroun tel qu’il
est aujourd’hui mais pour celui qu’il sera dans dix, dans vingt ans. Le
Cameroun d’aujourd’hui est le reflet des générations qui nous ont précédées.
Celui de demain sera le reflet de notre génération. Ces personnes aujourd’hui à
la tête du Gouvernement laisseront bientôt le pouvoir. Allons-nous reprendre
les rênes du pays avec la même mentalité et les mêmes limites qu’elles ?
C’est de notre avenir qu’il s’agit messieurs, ne l’oublions pas. Les
entreprises de demain seront dirigées par nous. Allons-nous préserver les
styles de gestion qui étaient d’usage avant nous alors que le monde avance?
A l’ère de la mondialisation, nous devons reposer les efforts que nous
fournissons sur les TIC. Les pays occidentaux ne sont pas les seuls à disposer
de talents, nous en disposons également. L’expression « fuite des
cerveaux » prouve que nous avons aussi des « cerveaux ». Ils
pourraient poster leurs mémoires en ligne, rédiger des articles tels que
celui-ci. Nos mathématiciens pourraient exposer au monde des formules par eux
créées, nos économistes pourraient inventer de nouvelles théories économiques,
nos ingénieurs pourraient créer des applications et des appareils novateurs et
révolutionnaires ! Nombreux sont les camerounais qui sont talentueux et
intelligents. Malheureusement, le manque de TIC fait de l’ombre à leurs
potentiels et limite leurs opportunités. Aujourd’hui en occident, les jeunes
hackers sont régulièrement recrutés par les firmes multinationales (l’année
dernière, Facebook a recruté GeoHot,
Microsoft a recruté un hacker de 14
ans) ou par leurs Gouvernements (l’année
dernière, la US Navy a lancé une annonce
de recrutement de hackers). Quand bien même ils ont enfreint la loi, leur
talent non seulement leur a évité la prison, mais en plus leur offert des
opportunités en or. Et ce genre d’opportunités se présente à tous ceux qui ont
des aptitudes hors du commun dans quel que domaine que ce soit, même dans le
sport (nous voyons tous les jours des jeunes américains issus de quartiers
défavoriser avoir accès aux bourses pour les études supérieures, simplement
grâce à leurs aptitudes pour le football, le basketball, etc.). Si ce genre
d’opportunités s’offre aux jeunes occidentaux, alors elles peuvent également se
présenter aux jeunes camerounais, pourvu que leurs talents soient visibles. Et
quel meilleur moyen de montrer au monde notre potentiel que de s’armer des TIC ?
Il y a aussi ceux-là qui disent que
l’Afrique, et donc le Cameroun ont de plus sérieux problèmes à résoudre. A
ceux-là je réponds qu’à la base, l’objet de tous les progrès scientifiques est
de résoudre les problèmes de la société et/ou de faciliter notre mode de
vie. On est ainsi passé du télégraphe au
téléphone fixe au téléphone mobile, toujours dans le but d’améliorer la
communication entre les hommes. De même, nous pourrions trouver dans la
technologie des réponses à nos problèmes. Arthur Zang a trouvé en le cardiopad
une réponse aux problèmes cardiaques des camerounais, Churchill Mambe propose
en Njorku une solution au problème du chômage. Attaquer nos problèmes sous
l’angle de la technologie est une recette qui porte ses fruits.
Je le répète encore, je rêve
aujourd’hui d’un Cameroun dans lequel la technologie tient une place plus
importante dans la société. Mais je ne pense pas être tellement en avant. A
vrai dire je ne vois même pas assez loin. Je me limite à voir un Cameroun tel
que les occidentaux fonctionnent aujourd’hui tandis que les occidentaux ont une
vision du monde tel qu’il pourrait être
dans dix ou vingt ans, notamment le géant Windows. Ca semble
peut-être impossible à réaliser maintenant, mais si nous commençons à étudier
le problème des TIC au Cameroun, alors dans trente ans, plus rien de tout ce
qui précède ne sera un rêve ! Ce sera la réalité des prochaines
générations.
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